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Propos d'Economie Libanaise
Propos liminaire
Les pays qui n'ont pas des richesses naturelles à tirer de leur sol, il faut leur donner la liberté économique pour richesse. Autrement, comment vivraient-ils?
Quelle misère ne serait pas la leur sans toutes les ressources de l'intelligence?
C'est le cas du Liban, de la façon la plus saisissante; et c'est ce qui fait qu'ici, il faut défendre la liberté comme d'autres défendent leurs mines d'or, leurs gisements de pétrole, leurs plantations d'hévéas ou leurs champs de coton.
Un gouvernement libanais doit toujours se dire qu'il ne faut pas faire des Libanais des hommes qui, craignant de posséder des richesses visibles parce qu'ils redoutent la persécution fiscale, ne veulent plus que de la forme mobilière et secrète de la richesse, de sa forme mouvante et vagabonde.
Le Liban est, dans son genre et dans sa petite taille, un pays unique au monde. Il appelle une compréhension particulière parce que son destin est justement un destin "hors série".
L'arsenal scientifique des économistes de l'univers peut paraître illusoire et vain pour un pays comme le nôtre; nous sommes suffisamment économiste et financier nous-même pour pouvoir en témoigner avec force.
La dernière faute à commettre ici est de vouloir prendre modèle, pour la fiscalité et les finances, sur des pays où le cas exceptionnel du Liban est inconnu; ou faudrait-il commencer à l'usage du "technicien" étranger par un cours de géographie et d'histoire?
Le premier capital des Libanais, en matière d'économie et de finance, ce n'est pas l'argent, c'est l'intelligence; c'est l'intelligence et c'est la rapidité de mouvement. On ne traque pas sans folie, on n'impose pas sans une modération extrême un capital comme celui-là. Il n'est pas un financier libanais (chargé surtout des finances publiques) pour ignorer que, sur dix Libanais, neuf (et une fraction) vivent au-dessus de leurs moyens matériels en comptant sur leurs moyens intellectuels.
Beaucoup de Libanais ne gagnent que parcqu'ils dépensent. Les premières lois valables pour les Libanais sont celles de la psychologie, avant celles de l'arithmétique. Il faut faire bien attention à cela.
Michel Chiha, 1944